Grand RAid 2009, Barbidule raconte

28-11-2009

 

GRAND RAID 2009

 

 

Je vais essayer de vous faire vivre cette course « la diagonale des fous 2009 ».

Je ne suis pas poète ni écrivain, je suis tout simplement un petit coureur régional qui vit sa passion avec ses courses de l’extrême.

J’ai déjà parcouru de nombreux kilomètres dans plusieurs pays dont le Maroc, la France, l’Amérique, l’île de la Réunion (océan indien).

Toutes ces courses demandent de nombreux sacrifices tant physique, mental et financier.

Pour moi c’est l’aboutissement de mes efforts à l’entraînement et d’une organisation familiale rigoureuse dans ma vie de tous les jours.

Je  réussis tout cela grâce aussi à mes sponsors qui me font confiance et à qui je l’espère, j’apporte un peu de bonheur.

Dans chacune des courses de notre belle région des Hauts-Pays je me suis fait connaître. Beaucoup de coureurs me félicitent et je leur raconte mes aventures qui font rêver.

 

Hé oui j’ai fait « OUF » à l’arrivée je vous raconte.

 

Départ de Orly vers Saint Denis de la Réunion +/- 11 heures de vol.

Arrivée à Saint Denis une télévision locale m’attend pour une entrevue.

M Serge Jaulin de la chaîne « comédia prod » et »sport + » réalise l’interview.

 

Le jeudi 24 octobre 2009 : départ de Cap Méchant à 00h00 sous une pluie battante.

Nous sommes + de 2400 candidats au départ, à l’arrivée il en manque + d’1/3.

Quelques  900 abandons sont enregistrés.

 

Je prends un départ assez rapide pour être dans les 300 à 400. Le but est de bien me placer dans la montée vers le volcan.

 

Je suis assez bien, le seul souci c’est cette pluie tropicale qui nous trempe jusqu’aux os.

25 km plus loin  et 2400 m d’altitude, c’est  l’Oratoire, il fait froid, de plus je suis trempé, je suis obligé de mettre ma couverture de survie sur ma poitrine, j’ai très froid.

Après un bon ravitaillement (soupe, coca,  pain et biscuits),  je repars de plus belle vers la descente de Mare à boue,  lieu où mon épouse m’attendait depuis 01h00 du matin.

 

J’arrive à l’endroit vers 10h –11h, pas de bol je ne la vois pas.

Nous nous sommes manqués, un moment de distraction, d’inattention.

Je suis déçu mais je repars vers l’autre ravitaillement sur la plaine des Cafres +/- 56 km direction Kervegem. C’est une descente périlleuse avec échelle.

 

Puis,  en route vers le Pilon des neiges Alt 2206 m et une descente vers  Cilaos (cirque) 70km.

Graziella m’attendait sur le stade. Je me lave les pieds, regarde si tout va bien. OK.

Je mange un repas chaud (pâtes, soupe, pain), ensuite je me mets en route vers la 2ème moitié du parcours, vers un autre col : le Taïbit  Alt 2080 m pour redescendre vers Marla (cirque de Mafate).

 

 

 

 

 

 

 

Et là  « patatras » je glisse deux fois.


Je me dis « fais gaffe » et « pan » la troisième  fois est fatale, je tombe et coince ma cheville droite, pas de pot, verdict : entorse.

Je me traîne  jusque  Trois Roches pour me faire soigner. Les kinés me font un strapping, ils me serrent bien la cheville pour pouvoir continuer.
Il faut savoir que de Cilaos jusque  Deux bras il n’y a pas de moyens de locomotion, c'est-à-dire que du 82ème au 122ème km je me fais soigner régulièrement.

 

Pas toujours facile, je « mords sur ma chique ».
Je téléphone à ma femme et mes amis pour leur dire que  j’ai la cheville en compote.
Sur tout le trajet on m’encourage. Je prends quelques  comprimés de« dafalgan ».
Les kinés font un travail extra.


je perds énormément de temps je suis à la peine, je marche.
Les km défilent mais pas comme je le souhaiterais.

Plein de choses vous passent par la tête, je suis près de l’abandon.
Mon ami Yves Waroquier m’envoie un SMS et me dit « cela n’est pas grave si tu abandonnes mais fais gaffe à ta cheville ».
Je sens que derrière moi  ma famille, plein d’amis m’encouragent (Madeleine et Joël de la Réunion).

 

J’ai les larmes dans les yeux et toujours cette idée d’abandonner la course dans la tête.

La nuit, pas facile sur les chemins très, très caillouteux, les escaliers, les roches de plus en plus hautes à monter, de faire le point. Les doutes m’assaillent.

Je me fais dépasser par de nombreux coureurs, je comprends que je passe en 14 heures à Cilaos 70ème km,  je suis à la  + /- 600ème place.

 

Arrivée à Deux Bras, là je sais qu’il y a moyen de me transporter vers la route la plus proche afin que mon épouse puisse me récupérer.

J’essaie de la joindre par téléphone, bien entendu en pleine montagne pas de réseaux. Imaginez.

Le ravitaillement est proche, je passe le contrôle et là je remets mon dossard (698) , j’abandonne, c’est la toute  première fois. J’ai 35 h 31 de course.

Je vais en direction de l’infirmerie. La doctoresse me visite et me dit : « vous avez une belle entorse ». 

 

La vie est faite de coïncidences, dit-on.

Coïncidence en effet,  au même moment je vois le directeur de la course.

Celui-ci m’explique qu’à Dos d’âne je pourrais voir ma femme et également décider ou non d’abandonner.

Il savait ce qu’il disait et il a peut être vu dans mes yeux que je n’étais pas vraiment prêt à abandonner.

D’autre part, je sais  que ma femme sera quoi qu’il arrive à Dos d’âne + /-  5 km

Je prends avis auprès du docteur. Elle me dit : « si vous voulez continuer c’est vous qui décidez ».

C’est décidé, je reprends mon dossard.
« Vas-y biloute » tu peux le faire. Ce qui veut dire   + /- 5 km en montagne avec une patte folle, j’vous dis pas.

Et toujours des encouragements des coureurs et randonneurs.

Arrivée à Dos d’âne samedi où ma femme m’attend, il est 14 heures

Je me fais soigner : massage et strapping,  médoc. (J’ai été très bien soigné par les kinés et médecins.)
Je mets de nouvelles chaussettes, +baskets, enfin de quoi bien repartir.

L’abandon n’est plus d’actualité.

 

Finir c’est mon objectif coûte que coûte, il me reste +/- 20km jusqu’au passage de la ligne.

Mais encore un col à 1500m Piton Batard à passer, cela n’est plus important.

Je fonce façon de parler, je marche en criant « Aie, Aie !!! » tout le long,

Cela devient une habitude. La douleur est là mais je maîtrise, je pense à l’arrivée.

 

J’arrive à  Colorado à 5 km de l’arrivée. Là on me dit que je suis repris sur la liste des abandons. Je vois un responsable  et lui  explique que j’ai repris mon dossard après réflexion à Deux Bras. Tout rentre dans l’ordre.

 

Voilà mon téléphone sonne, il s’agit d’Alice  (militaire à Saint Denis et fille d’un de mes amis en France).  Celle-ci me dit qu’elle me rejoint à  Colorado; elle fait le chemin en sens inverse : La redoute –Colorado.

En attendant sa venue je me fais soigner, je mange et je guette son arrivée en haut de Colorado.

Monter une colline de nuit n’est pas facile pour une fille seule, elle a beaucoup de courage.

Dès qu’elle arrive je l’embrasse, je suis très heureux de la voir.

 

Je reprends mon bâton en bambou donné par un randonneur. Ce bâton me soutient dans la descente.

Avec Alice nous repartons pour les 5 derniers km de bonheur.

 

Graziella m’attend en bas près de l’arrivée au stade.

Comme à chaque course de l’extrême je sens les larmes monter. L’émotion est à son comble.
Photos, vidéos pour immortaliser l’instant après + de 46 heures de course.

 

Je ne suis pas un sur humain, je suis tout simplement moi. La course à pied est ma passion.
J’aimerai tant que les jeunes puissent prendre exemple sur nous.

Ce raid, un des plus difficile au monde est une lutte contre soi-même. Il faut insister sur le fait que tout est dans le mental.
Pendant cette course, j’ai été stupéfait de croiser des femmes qui ont été extraordinaires.
On parle du sexe faible mais il faut les voir.

Il faut rester humble, avoir le respect de tous ceux qui s’engagent dans cette aventure.


Je dédie cette course à mon petit fils Timéo et à toute ma famille